33 jours après le début de la période de deuil marquant l’épidémie ayant frappé les disciples de Rabbi Akiba suite aux dissensions et au manque de respect qui régnaient parmi ces 24 000 étudiants, nous voilà prenant une pause pour célébrer la joie.
Ce 33ème jour du compte de l’Omer est celui de la fin de cette épidémie mais
également le jour du décès de Rabbi Chimone Bar Yo’haï qui souhaitait que la date de sa mort soit consacrée à un jour d’allégresse. Rabbi Chimone Bar Yo’haï, appelé Rabbi Chimone ou encore également connu sous l’acronyme de Rachbi, est le premier à avoir dévoilé la dimension mystique de la Torah, la Kabbalah qu’il popularise dans le Zohar.
Rachbi voulait que le jour de son départ sur terre soit fêté comme un jour de joie car il marque le jour de sa montée au ciel, ce qui pour lui, est un jour d’accomplissement ; « Mon âme est unie à Lui, éclairée en Lui, absorbée en Lui. » C’est cette joie là de rejoindre le divin que nous célébrons le jour de Lag Baomer. Rappelons que Rachbi a vécu 13 années dans une caverne, période durant laquelle il s’est consacré exclusivement à l’étude et la prière.
L’amour de l’autre sauve la vie
Rachbi qui était un disciple parmi les 24000 étudiants de Rabbi Akiba a survécu à cette épidémie. Pourquoi lui ? L’une des explications données à ce sujet est que chaque disciple avait une compréhension personnelle de l’enseignement de Rabbi Akiva et qu’il servait D.ieu selon la voie issue de sa compréhension. Chacun d’entre eux était donc tellement imprégné de la justesse de sa propre voie qu’il considérait comme défectueuse toute autre façon de comprendre et de servir D.ieu. De plus, étant disciple de celui qui mettait l’amour du prochain au-dessus de tout, chacun s’efforçait d’influencer ses camarades selon la voie qu’il estimait la plus vraie. Lorsqu’il se heurtait à leur refus d’adhérer à sa vision puisqu’ils suivaient la leur, il ne pouvait dissimuler le sentiment négatif que lui procurait la contemplation d’un autre type de service, défectueux à ses yeux, et ne pouvait du même coup éprouver un vrai sentiment de respect envers celui qui, selon lui, s’en contentait.
Etre à ce point immergé dans sa propre conception que l’on ne remarque plus l’existence d’une perfection inhérente à une autre conception est questionnant. Rabbi Akiva lui-même s’est efforcé tout au long de sa vie à atteindre l’instant de l’abnégation où il se sacrifierait pour l’Unité Divine. Cette abnégation, appelée Messirout Néfèch, emplit l’être au point qu’il ne reste aucun point de sa personne qui soit extérieur à cet état. Les disciples de Rabbi Akiva avaient reçu de celui-ci ce désir intense de Messirout Néfèch, aussi leur service en était-il littéralement imbibé, les envahissant tout entier. Ils étaient donc tellement acquis à leur propre service que rien n’existait en dehors de celui-ci. Pourtant, ce don de soi dans le service ne correspondait pas, malgré son intense dévotion, à l’Intention Divine.
Un don de soi aux autres
En effet, l’abnégation seule se traduit par un élan vers D.ieu, qui conduit à vouloir sortir du corps et du monde. Malgré la noblesse de la motivation, elle ne peut exprimer l’Intention Divine, qui spécifie que l’élan doit conduire à un retour vers le monde, pour propager la Présence de D.ieu ici-bas, dans les structures de la logique et de l’esprit.
Les disciples de Rabbi Akiva, emplis de l’abnégation seule, détruisaient en fait les structures du monde, transformant celui-ci en un désert alors que les cinq disciples survivants qui ont édifié la Torah ont réalisé la construction de structures, témoignant ainsi de l’existence d’un retour pour loger le Divin dans un monde construit. Eux aussi avaient reçu de leur maître sa Messirout Néfèch, mais dans sa conception parfaite, telle qu’elle se trouvait chez Rabbi Akiva : un élan accompagné d’un retour.
C’est cette conception que l’on trouve, sous sa forme la plus révélée, chez Rabbi Chimone bar Yo’haï : les treize ans qu’il a dû vivre, cloîtré dans la caverne et ne pouvant accomplir un grand nombre de mitsvot sur le plan matériel, ont été pour lui une période où dominait l’abnégation, l’élan. Cette période a contribué à forger la période suivante, lorsque, sorti de la caverne, il ne recherche pas l’isolement et le refus du monde, mais au contraire à soigner et à le réparer. Rabbi Chimone, entré dans la caverne à cause de son abnégation, ne pouvait qu’en sortir pour réparer le monde.
Ces enseignements sont le fruit des réflexions compilées du Rabbi. Des enseignements mis en pratique au quotidien par les Beth Habad qui sortent de leur environnement pour aller à la rencontre de chaque âme juive en tentant de comprendre le fonctionnement de l’autre, sans jugement de valeurs. Un élan initié par le Rabbi de Loubavitch gorgé d’espérances qui à l’instar de la vie de Rachbi, lui ayant connu l’obscurité dans la caverne est venu délivrer au monde les secrets de la Torah, à force d’abnégation et de service divin.
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